Campagne
A tous mes amis de la ville
Entre les averses on guette le facteur. On attend une lettre. On est très seul mais dans la joie d'y être.
Car dans l'attente de ces nouvelles de l'ami, on y est déjà moins seul. Au ciel, la lumière revient. Toujours rien du facteur, rien de la lettre. On a soigné les poules, les lapins, la chèvre qui attend des petits... De l'appentis on a rapporté fagot et petit bois pour allumer la cheminée. Il faut remonter la température de la pièce, sécher la veste, le pantalon crotté, réconforter sa solitude. Une des chattes, poil humide et fumant surveille le feu. Sa tête tourne, attentive, elle regarde les flammes. C'est la frileuse.
A la nuque qui se glace on comprend que la pluie nous a traversés : il faut retirer la chemise, mettre du sec, de l'agréable. Après on se ressert une tasse de café chaud du matin qu'on sirote les jambes tout près du chat sur le bord du foyer, les regards dans l'âtre. C'est la mi-temps de la matinée. Un moment en suspend.
A la campagne, parce qu'on ne compte pas les heures, les journées se divisent. Et comme on prend le temps... on l'a ! Alors, sur l'instantané, des silences se posent...
Un moteur. On sait que le facteur est à la boîte. On sort. L'attente n'est déjà plus la même. On avance sans impatience. Pas de lettre... Tout de même on dit deux mots de la pluie qui va durer, puis ...on rentre.
Un autre temps bascule vers midi.