Le tri - Tristan Cabral

Publié le par Serge Prioul

 

 

Un article comme un clin d'oeil à une amie rencontrée hier et qui se reconnaîtra.

Un article qui n'est pas, non plus, un clin d'oeil.

 

 

Le Tri

 

Les préposés au tri passent entre les lits... Dans un petit bureau, un infirmier chef joue les matchs gagnants.


Un vieux malade dit à l'entrant : "Ici, on sait quand on arrive, on ne sait pas quand on sort. C'est bien mieux en prison !"


C'est gai ! Et toujours un bruit incessant de chariots. On dirait qu'on roule des cercueils... Et l'odeur tenace de détergents et de haricots... comme en prison...


Une femme en robe marron, plutôt moche, embrasse son fils et part, presque en courant. Elle dit au surveillant : "Gardez-le bien, je vais être tranquille pour six mois." Et le garçon lui dit presque en pleurant : "Maman, tu ne le penses pas... Dis, tu ne le penses pas ?"

 

Les ambulanciers commentent les résultats du foot. Les secrétaires racontent leurs dernières vacances au Club Med. Ca baigne... Elles disent aussi que trop de crayons disparaissent, qu'elles vont le dire au directeur...

 

Le tri est fait. Certains entrants vont aux chambres aux murs capitonnés de force : ceux qui sont dangereux pour eux-mêmes, on les aura à l'oeil, les autres pas.

 

Ici, on prend les vêtements, et on confisque tout ce qui pourrait servir à écrire. Et bien sûr, on ne peut prévenir personne. On prend la T.A. et ensuite, 25 mg des Nozinan. Le Compralgyl viendra après, si agitation.


Toucher à un infirmier, c'est l'isolement immédiat.


Surtout, recracher les médocs, s'ils te forcent à les avaler.


Voilà. L'entrant a été trié. Ca rappelle vraiment quelque chose, là-bas, il n'y a pas longtemps, de l'autre côté du Rhin...

 

 

Tristan Cabral

H.D.T. (Hospitalisation à la demande d'un tiers)

 

 

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
C
<br /> <br /> Serge j'aime beaucoup. Comme je l'écrivais déjà su un autre de tes articles, je repense toujours au film "Vol au-dessus d'un nid de coucous". Je me dis aussi souvent "le plus fou des deux n'est<br /> pas celui qu'on croit...en pensant aux malheureux enfermés "de force".<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
S
<br /> <br /> Mais bon, comme dit Tipanda, il faut relativiser. Tout n'est pas ainsi. (Mais, pour y avoir fait quelques séjours, j'ai remarqué<br /> que les soignants des HP ne sont pas des plus "attentifs".<br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> <br />  Hélas, le système ne peut pas prendre en charge toutes les réactions personnelles.<br /> <br /> <br /> Quand on voit avec quelles difficultés nous abordons la présence de gens un peu "bizarres", autant déclarer forfait avant d'engager une relation avec de vrais malades mentaux.<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
T
<br /> <br /> Au premier abord, on les plaint, ces triés ... solidarité humaine. Et puis, on plaint ceux qui devraient les supporter s'ils n'étaient pas triés, classés et surtout empêchés de nuire. La folie<br /> est une forme d'exclusion, c'est dommage mais que les bonnes âmes promptes à critiquer s'engagent à payer de leur personne pour vivre avec les fous. <br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
S
<br /> <br /> Ce qui ne résume pas à laisser faire le système. Il y a sûrement à revoir en la matière mais le législateur se penche bien peu sur le cas.<br /> <br /> <br /> <br />