Kebab

Publié le par Serge Prioul

Cette jolie jeune femme semble ignorer tout ce qui l’entoure. Elle me regarde à peine lorsque je lui emprunte son stylo ( saura-t-elle un jour que c’était pour parler d’elle ?) S’il ne s’agissait que de moi ! Aucun coup d’œil à personne. Dédaigneuse. La meuf au-dessus de la mêlée !
Alors arrive le jeune homme aux yeux verts. C’est un habitué que j’ai souvent remarqué entre le Kebab et le plat du jour. Il se tient dans le dos de la fille. Pourtant, curieusement, elle se retourne - et j’en déduis que le dédain donne des yeux derrière la tête !  Tout à coup elle semble différente, confuse, plus jeune. Je la sens  fragile. Elle rougit un peu. Et lorsqu’elle s’adresse au patron du resto, sa voix est moins assurée. Certainement, elle voudrait que le beau gosse la remarque ; ce qui est sûrement le cas, mais comme lui aussi sait cela…  sans un regard pour la belle dépitée, il repart, sandwich américain à la main tandis qu’elle reste là, rouge un peu, pendant un bon moment encore et que je lui rends son stylo dont, à ce moment-là, elle n’a vraiment rien à faire !

                    *********

Quelques jours plus tard, le même resto rapide, le même Kebab ou bien son frère, le même mal d’estomac qui me torturera cet après-midi mais pour l’heure il ne s’agit que de mater la même jolie blonde qui est revenue. Déjà pourtant, comme chaque fois que s’épuise en moi la part d’étonnement que me réserve toute nouvelle rencontre, je la trouve moins canon et cette usure des choses me peine un peu.
Aujourd’hui - hasard ou calcul ? -  la jeune femme s’est assise au bar, à ce coin du bar d’où elle peut observer toute la salle – elle qui hier ne regardait personne ! Elle surveille les entrées. Moi aussi. J’ai même du mal à assurer : la nana, la porte, le Kebab, la harissa, heureusement que l’estomac me fout la paix. Je guette en particulier son teint…Me satisferait un léger rosissement au cas où entrerait le beau gosse aux yeux verts.
Le temps passe, les assiettes se couvrent depuis longtemps de cendres de cigarettes, mon estomac commence à bosser, le type ne viendra pas aujourd’hui. Nous le savons tous les deux. Je suis plus déçu qu’elle !

Publié dans Fougères

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C
<br /> <br /> Délicieux ce Kebab ! Félicitations !  Comme on voudrait savoir faire à la fois aussi court et dense . On y est dans ce restau, assis plus loin, à observer le narrateur, qui observe<br /> l'héroine. On voit bien le jeune gars qui rentre...en fermant les yeux, on sent les odeurs de cuisine, de tabac blond ou brun venant de la terrasse, et de pots d'échappement des voitures qu'on<br /> entend passser...suis-je, bete, yeux fermés, on ne peut plus observer...mais si...évidemment...<br /> <br /> <br /> Complètement d'accord, on est mieux dans ce bistrot que dans un endroit plus sélect, où les clients, se croyant obligés de tenir un role, sont finalement tous semblables. Que pourrait-on observer<br /> ou prédire ?  <br /> <br /> <br /> Un lecteur demande une suite, ce serait très bien, mais si l'on n'a pas d'autre choix, on a tous les éléments en main pour l'imaginer chacun à notre façon...<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Bonjour. Sympa de retourner en arrière lire quelques textes plus anciens. Oui, je suis un voyeur... J'aime observer les gens mais ce n'est qu'un prétexte à<br /> s'observer soi-même aussi. Mais c'est vrai que j'aime les jeunes gens. Quoique beaucoup disent, ils sont très intéressants.<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> <br /> le Kebab; je le prends avec une sauce blanche et sans oignons<br /> <br /> <br /> Bonne fin de soirée.<br /> <br /> <br /> PS: j'ai ajouté 2 dessins pour expliciter le premier<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> J ai aussi levé le pied sur ces mauvaises harissas des kebabs. Mais j aime bien y aller une fois par mois. Je préfère ces endroits où l on rencontre des jeunes gens<br /> de toutes les origines que les vilains restos snobs, bobos, franchouillards...<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> <br /> A quand la suite? Cela pourrait être le début d'un bon roman...<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Bonsoir Stéphanie,<br /> <br /> <br /> je crois bien que je n'écrirai jamais de roman. Il me faudrait être un rêveur et je suis plutôt un contemplatif. Je passe souvent des heures à regarder les gens et<br /> cela seul m'inspire. J'ai beaucoup de textes, rarement aboutis, parfois de simples notes qui devaient former un ouvrage sur Fougères (la ville, une ville comme tant d'autres...) mais il aurait<br /> fallu faudrait bosser, prendre le temps de s'atteler à l'écriture... Quand je serai vieux stèph !<br /> <br /> <br /> Bisous.<br /> <br /> <br /> <br />
G
<br /> <br /> j'aime beaucoup ce petit texte plein de poésie, d'instants de vie<br /> <br /> <br /> bonne soirée<br /> <br /> <br /> guylène<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> J'en ai quelques uns comme celui-là et je peux en écrire d'autres... Toi aussi, dans tes dessins tu sais mettre des tranches de vie, il me semble. Merci d'être<br /> passée Guylène. A bientôt.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> Génial ! C'est palpitant et nous sommes dans l'attente avec toi, avec elle !.... Quelle atmosphère bien écrite... presque palpable !!<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Merci Claire-Cerise. Génial est sans doute un peu fort. J'essaie d'écrire au mieux. Je suis bien loin du génie et même de me plaire. Voilà pourquoi, sans doute, je<br /> n'ai jamais cherché à publier.<br /> <br /> <br /> C'est vrai que j'aime les atmosphères. L'attente éveille souvent une démarche artistique.<br /> <br /> <br /> <br />